Un nombre croissant de Français – et cela se traduit, de scrutin en scrutin, par des résultats toujours plus désastreux dans les urnes – ont compris que Nicolas Sarkozy est un menteur et un manipulateur prêt à saisir toutes les opportunités pour se faire mousser et redorer une image gravement ternie par un mandat calamiteux. Avec une prédilection pour le registre compassionnel censé emporter l’adhésion populaire. Hélas ! pour lui, cela prend de moins en moins dans l’opinion et tend même à alimenter le ressentiment de nos concitoyens, furieux d’être pris à répétition pour des naïfs décérébrés. Les dirigeants étrangers eux-mêmes, pourtant tenus par des contraintes diplomatiques, ne se laissent désormais plus prendre aux manœuvres du président français. Dernier en date : le Premier ministre japonais...
La tragique suite de catastrophes qui a lourdement frappé le Japon reste évidemment – sans doute pour de longues semaines encore – au cœur de l’actualité, entre les villes dévastées par le tsunami d’un côté, et l’effroyable menace que continuent de faire peser sur l’archipel les réacteurs endommagés de la centrale nucléaire de Fukushima, de l’autre. La plupart des forces armées et des secouristes nippons est toujours à pied d’œuvre pour travailler d’arrache-pied et, dans des conditions souvent pénibles, voire périlleuses, sauver ceux qui peuvent l’être et venir en aide aux sans-abris, victimes du tremblement de terre et du tsunami, ou déplacés hors du périmètre de sécurité des 30 km autour de la centrale en perdition. Et que dire de ces hommes, de ces héros, techniciens ou pompiers, qui, au péril de leur vie ou au risque de développer de terribles cancers, s’efforcent avec un admirable courage de sauver la vie de leurs concitoyens ou des habitants des pays proches ? Nous devons à tous ces gens-là un respect total.
Les responsables politiques japonais eux-mêmes, quelle que puisse être leur responsabilité dans l’implantation des centrales nucléaires, le choix des techniques opérationnelles validées naguère pour les réacteurs, et la sous-estimation de l’ampleur des tsunamis, sont pour l’heure sur le pont et préoccupés presqu’exclusivement par les opérations de sauvetage des victimes du tsunami et le refroidissement des réacteurs de Fukushima. C’est précisément dans ce contexte que Nicolas Sarkozy, désireux de montrer devant les caméras de la planète sa compassion envers le peuple japonais comme il le fait en France à chaque fait divers médiatique envers les familles des victimes, a souhaité s’inviter au Japon à l’occasion du voyage qu’il doit effectuer le 31 mars à Nankin (Chine) pour participer à un G8 consacré à la réforme du système monétaire.
Cette initiative, pour le moins déplacée en l’état actuel de la situation, n’a manifestement pas été goûtée par Monsieur Naoto Kan qui a bien autre chose à faire, dans un pays en deuil, qu’à dérouler le tatami rouge à Nicolas Sarkozy venu chercher là des points de popularité. Dans une réponse courtoise mais ferme, le Premier ministre japonais vient d’opposer un refus sans appel au président français. Nicolas Sarkozy devra, s’il souhaite toujours se rendre au Japon, attendre que les hypothèques environnementales et sanitaires liées à l’état des réacteurs de Fukushima soient levées. Attendre que les victimes aient été dénombrées et rendues à leurs familles pour un service funéraire dans les régions dévastées par le tremblement de terre et le tsunami. Attendre que la vie commence à reprendre ses droits. Attendre tout simplement que soit écoulé le délai minimum de décence qu’impose une telle série de catastrophes.
L’indécence, précisément ce que reprochaient Sarkozy et ses amis aux responsables des Verts et d’Europe Écologie lorsque ceux-ci ont pris la parole, dans les jours qui ont suivi la catastrophe nucléaire, pour demander, non dans l’immédiat comme cela a été honteusement affirmé par les caciques de l’UMP, mais dans les prochains mois, l’ouverture d’un légitime débat sur l’avenir de la filière nucléaire et l’éventualité d’un référendum.
Égocentrique et plus manipulateur que jamais, Nicolas Sarkozy voit la paille dans l’œil de ses adversaires, mais manifestement pas la poutre dans le sien. Normal, au fond, car comme le disaient avec beaucoup de bon sens les anciens : « Tel on est, on croit les autres ! »